Oui, c’est un fléau. Si vous en êtes victimes, il va falloir prendre le taureau par les cornes et changer les choses. Parfois d’une façon radicale. Êtes-vous prêt pour cela ?Je vais aussi vous raconter mon histoire.
Le brown out, c’est quoi ?
Tout le monde aujourd’hui sait ce qu’est le burn-out, sans nul doute la pathologie liée au travail la plus connue. Cet épuisement processionnel dû à une surcharge de travail touche n’importe qui, dans n’importe quelle catégorie socioprofessionnelle.
Vous connaissez certainement quelqu’un qui en souffre. Cette pathologie possède son opposé, moins connue : le bore-out. Ici, c’est l’ennui au travail qui est à l’origine d’un malaise chez le travailleur l’entraînant dans une lente dépression. L’ennui au travail est une donnée bien présente qu’il ne faut pas prendre à la légère. Selon une étude de l’agence Qapa1, près de 63 % des salariés interrogés confessent s’ennuyer au travail, 29 % des femmes allant jusqu’à qualifier leur poste de « très ennuyeux » contre 26 % de leurs homologues masculins.
Le brown-out est la plus récente des pathologies mises en évidence. En anglais, ce terme désigne une coupure d’électricité, une coupure de courant. Le salarié atteint de brown-out n’a plus ni énergie ni motivation pour ce qu’il fait. Il n’y voit plus de sens, ne comprend plus les tâches qu’il doit mener à bien, ce qui entraîne un absentéisme important et une profonde déprime.
Cela dit, les deux peuvent se cumuler. Il est tout à fait possible en effet d’avoir un sentiment d’ennui et de perte de sens dans son travail. Les deux vont parfois ensemble.
Une crise du sens au travail
La crise de sens et d’ennui que connaissent un nombre croissant de travailleurs salariés est un véritable fléau.
En 2013, l’anthropologue américain David Graeber a lancé un pavé dans la mare avec un article publié dans le magazine Strike1. Il en fera un ouvrage qu’il intitulera Bullshit Jobs2. Il y dénonce les « jobs à la con », de plus en plus nombreux dans nos sociétés.
Ce sont ces emplois inutiles, superflus, voire néfastes qui sont – hélas ! — une réalité dans notre économie. Il arrive même que les salariés eux-mêmes n’arrivent pas à justifier l’existence de leur travail et à expliquer le sens de ce qu’ils font. Comment, alors, ne pas s’étonner de cette crise identitaire et des syndromes qu’elle provoque ?
2013, c’est aussi l’année de publication d’une enquête internationale menée par l’institut de sondage Gallup3. Cette étude a rencontré un grand écho à la mesure du malaise qu’elle a mis en lumière. Selon elle, les travailleurs « engagés » ne représenteraient qu’une minorité dans le monde : ils ne seraient que 13 %à s’identifier pleinement à leur travail et donc à s’investir véritablement.
Les autres – 87 % des salariés donc – seraient soit« désengagés » (63 %, ils subissent passivement leur journée),soit « activement désengagés » (24 %). Dans ce dernier cas, ils parlent négativement de leur travail et de leur employeur. Un chiffre hallucinant qui rend bien compte du malaise existant dans notre rapport au travail.
Très peu de gens font un métier qui les passionne. Au mieux, ils font un job qui a « des côtés intéressants ». Et que sont ces avantages? Un bon salaire, un certain statut social ou beaucoup de jours de congé… Sans aller jusqu’au « métier passion », peu de gens exercent une activité qu’ils aiment réellement.
Les symptômes du brown out
Ce sentiment de brown out se manifeste de plusieurs façons :
-expression régulière d’un sentiment d’inutilité
-perte d’attention dans les tâches
-démotivation progressive
-remise en cause professionnelle et personnelle
-manque d’énergie, plus grande fatigue
-difficulté à vraiment lancer sa journée
J’ai ici parlé du brown out pour les salariés. Il est vrai qu’il concerne avant tout ces derniers.
Cela dit, les freelances et les indépendants peuvent aussi être touchés.
Certes, ils le sont beaucoup moins. En effet, lorsque vous choisissez votre activité, lorsque vous êtes aux commandes de votre vie professionnel, vous êtes pleinement acteur, vous avez donc beaucoup moins de chances de ressentir une perte de sens.
Après des années d’activité, vous pouvez cependant ressentir une remise en question de votre activité. Vous avez changé, vous n’êtes plus en phase avec vos valeurs, vos besoins etc. Un certain ennui et une routine vous gagnent.
Les solutions pour sortir du brown out
Face à ces ressentis qui peuvent donc se transformer en symptômes et en mal-être, le désir de donner plus de sens à sa vie est légitime.
En être conscient
La première étape est d’être conscient de ce problème et de l’accepter. Difficile de dépasser quelque chose si vous êtes dans le déni…
Faire le point sur sa vie professionnelle
C’est une étape nécessaire. Il faut prendre le temps pour cela.
Faite le point sur ce que vous voulez vraiment.
Comment votre projet pro s’inscrit dans votre vision de vie ? Êtes-vous au clair avec cela ?
Que pouvez-vous faire ? Quelles sont vos compétences, vos désirs ?
Il est beaucoup plus facile de faire des choix importants si vous avez une vision de vie claire.
Salarié : les choses que vous pouvez faire
Sans quitter votre entreprise, il existe peut-être des solutions si pour vous la sécurité de l’emploi est importante. Pour différentes raisons, il est peut-être délicat en ce moment pour vous de penser à un changement radical dans votre vie.
Tout d’abord, focalisez-vous sur les aspects les plus positifs de votre travail. Essayez de développer les facettes de votre activité où vous prenez le plus de plaisir. Soyez actif, proposez des projets qui vous tiennent à cœur. Ce sont ici quelques pistes.
Enfin, changez de poste au sein de votre entreprise peut être une solution.
Demander à travailler à distance
Choisir l’environnement où nous vivons peut faire une grande différence si vous êtes victime de Brown out.
Si vous rêvez de partir à la campagne et de fuir Paris, passer en télétravail peut vous donner une autre vision de votre travail, même si celui-ci manque de sens à vos yeux. En tout cas, cela peut suffire pour un temps
Réfléchissez de votre côté à cette option. Est-ce que cela vous permettra de trouver un équilibre sur la durée ? Est-ce que cela rentre dans votre vision de vie ?
Est-ce que cela vaut le coup d’essayer, même si votre travail ne va pas changer ?
Travailler et vivre sous les tropiques, ou à la campagne, peut faire une grande différence.
Si votre entreprise refuse votre demande, trouvez un poste de salarié à distance. De plus en plus d’entreprises proposent cela.
À lire : Les meilleurs sites pour trouver un travail à distance !
Devenir freelance
Il s’agit ici d’un changement radical. Vous accédez ici à la liberté géographique ainsi qu’à la liberté financière. Vous êtes aux commandes de votre vie professionnelle.
Une plus grande autonomie et, plus largement, un plus grand contrôle sur ce que nous faisons et produisons sont aussi des données qui peuvent nous aider à redonner du sens à notre vie professionnelle.
Ainsi, beaucoup de digitaux nomads gardent la même activité en passant à leur compte : ils ont simplement changé de statut, troquant celui de salarié contre celui de freelance et modifiant, par la même occasion, la vision qu’ils avaient de leur métier.
À lire : 17 cafés où travailler à Paris !
Travailler à leur façon, pour leur propre compte, quand ils le veulent et d’où ils le veulent leur a donné un nouvel élan. Comme s’ils avaient tout à fait changé de secteur d’activité.
Devenir indépendant n’est pas forcément l’idéal pour tout le monde. Mais travailler seul, cela s’apprend aussi.
En tout cas, cela mérite d’essayer au moins.
Il est certainement possible de vendre vos compétences en mode consultant et freelance. Vous avez peut-être déjà des contacts importants, des clients.
Se réaliser dans une activité que l’on affectionne
Enfin, dernière solution, encore plus « radical » ; créer une activité différente en démarrant de zéro, ou presque.
En effet, peut-être que passer votre activité en freelance ne vous intéresse pas au final. Vous avez vraiment envie de changer de secteur, d’activité et vraiment d’aimer ce que vous faites.
Dans ce cas, il va falloir vous trouver une activité, un secteur que vous aimez, où vous avez des compétences et qui réponds à un besoin et dont les gens, vos futurs clients, sont prêts à payer.
C’est tout le bien que je vous souhaite.
L’avis de l’expert : Viviane Saive, psychologue du travail.
Extrait de mon ouvrage « Libre d’être digital nomad ».
« L’ineptie qu’il ne faudrait pas “mélanger” travail et famille : cela n’est pas possible »
Les systèmes de travail changent sans cesse et se complexifient, aboutissant au niveau du salarié ou du manager à :
–– des problématiques liées à un phénomène de stress chronique, avec le sentiment d’être dépassé : perte de contrôle sur sa vie, baisse de concentration, sommeil et appétit perturbés, fatigue extrême avec souvent recours à des dopantsou calmants, TMS2, etc. ;
–– des souffrances liées à des relations interpersonnelles ou hiérarchiques perturbées, à des violences internes, tels incivilités ou harcèlement ;
–– des incompréhensions, frustrations, colère et agressivité envers le travail, ceux qui le font et in fine le monde entier : l’individu se sent étranger à lui-même ;
–– un manque de motivation, l’ennui, une perte de créativité voire de sens du travail effectué ;
–– une incapacité à faire baisser les tensions durablement par des méthodes classiques.
L’identité d’une personne se construit tout au long de sa vie sur ces deux pans de son existence que sont l’amour (couple, famille, amis) et le travail ou « l’activité » car le travail englobe aussi les tâches non rémunérées (femmes au foyer, bénévoles, etc.). Il n’existe donc pas de cloisons étanches entre ces différents facteurs de développement de la personne. D’où l’ineptie qu’il ne faudrait pas « mélanger » travail et famille : cela n’est pas possible.
Lorsqu’un sujet ne parvient plus à trouver des solutions adéquates à ses problématiques professionnelles, notamment sur le long terme, ses ressources physiques et psychiques s’épuisent : la dépression, sous toutes ses formes, peut émerger et le corps peut lâcher.
À lire : Pourquoi vous devez calculer votre taux horaire !
Mon histoire
Avant de devenir indépendant et digital nomad en 2011, j’ai été pendant plusieurs années salariés ici et là.
Je n’ai pas été victime du brown out pour ma part.
Non, il s’agissait plutôt de bore out, d’un certain ennui au travail.
Plus exactement, j’avais l’impression de « perdre mon temps » dans les postes que j’occupais en tant que documentaliste.
Le sens de mon travail était là, mais je ne me sentais pas vraiment à ma place, aligné avec ce que j’aimais faire.
Je souhaitais, enfin, je rêvais plutôt d’un travail que j’aimerai vraiment, et qui me permettrait en plus de voyager.
Je ne pensais pas forcément devenir indépendant à vrai dire. Pourtant, au final, c’est le chemin que j’ai pris.
Sans aucun regret.
Donner plus de sens à son travail (et à sa vie)
C’est le maître mot qu’il faut retenir ici si vous ressentez être en brown out.
Ce n’est pas une fatalité, les solutions sont là.
Vous n’avez qu’une vie.
Agissez, retrouvez-vous acteur de votre vie.
Faites le point. C’est le premier pas.
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